Tout savoir sur la retraite pour les frontaliers

L’heure de la retraite sonne bientôt et une nouvelle page est sur le point de s’ouvrir !

Il est temps pour vous de commencer à préparer cet évènement. Mais avant de songer à toutes les activités qui vous attendent, il va d’abord falloir se pencher sur une partie plus complexe : les démarches administratives pour récupérer votre retraite suisse !

Vous avez cotisé durant toute votre carrière, que vous l’ayez réalisée en totalité ou en partie en Suisse. 1er, 2e, 3e pilier… Comment débloquer vos fonds si ce n’est pas automatique ? Auprès de quelle administration devez-vous effectuer vos démarches en tant que frontalier ?

Pour vous faciliter le quotidien et vous aider à faire le grand saut, nous avons souhaité vous apporter nos conseils les plus avisés pour préparer votre retraite suisse. Pour tout comprendre, suivez le Guide !

Le guide pour tout savoir sur la prévoyance retraite
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Comment toucher sa retraite suisse en France ?

En Suisse, l’âge de départ à la retraite est fixé à 64 ans pour les femmes et 65 ans pour les hommes. Si vraiment vous ressentez le besoin de décrocher de votre travail, sachez que vous avez la possibilité de faire une demande de retraite anticipée de 1 à 2 ans maximum avant la date légale.

Suite aux accords bilatéraux signés entre la France et la Suisse, c’est auprès des caisses de retraite françaises que vous devrez effectuer vos démarches. Elles se chargeront de calculer vos annuités, que vous ayez exercé sur le sol français ou helvète. Les caisses françaises et suisses vont établir un lien entre elles afin de valider les déclarations. Veillez à bien anticiper vos actions, le délai administratif peut prendre un certain temps.

En tant que frontalier, vous avez cotisé au système de prévoyance suisse, plus connu sous le nom de 1er, 2e et 3e pilier. N’oubliez pas d’effectuer votre demande auprès des caisses compétentes suisses pour obtenir le déblocage des fonds. Prenez bien soin également de vous renseigner sur le versement des sommes. Celui-ci peut se réaliser sous forme de capital ou sous forme de rente. Mais une fois votre choix fait, vous ne pourrez plus revenir en arrière.

Pour percevoir votre retraite suisse, il est donc nécessaire d’engager vos démarches à l’avance et de chaque côté de la frontière.

 

Quels sont les 3 piliers de la pension de retraite suisse ?

Comme nous venons de l’évoquer précédemment, si vous travaillez en Suisse, vous cotisez inévitablement au système de prévoyance retraite helvète.

Rappelons à quoi correspondent ces 3 piliers dont les 2 premiers sont obligatoires.

 

1/ Le 1er pilier

Il s’agit de la prévoyance minimum étatique, obligatoire pour toutes les personnes qui travaillent en Suisse. Il comporte l’AVS (Assurance vieillesse et survivants), l’AI (assurance invalidité) et les PC (prestations complémentaires). Ce pilier vous assure le minimum vital pour la retraite, et couvre votre famille en cas de décès ou d’invalidité.

 

2/ Le 2e pilier

Il correspond à la prévoyance professionnelle obligatoire pour tout individu qui exerce son emploi sur le territoire suisse. La cotisation est directement déduite du salaire. Il est composé de la LPP (loi sur la prévoyance professionnelle) et vient compléter l’AVS et l’AI. La LPP assure un bon maintien du niveau de vie lors de la retraite et couvre les risques liés à l’invalidité et au décès. On distingue cependant 2 parties : la part obligatoire et la part surobligatoire (à partir d’un certain salaire).
La LAA fait également partie du 2e pilier, elle couvre les accidents professionnels et les indemnités journalières.

 

3/ Le 3e pilier

Totalement facultative, il s’agit ici d’une prévoyance individuelle composée du pilier 3 a et du pilier 3 b. La différence entre les 2 résidait dans leur fiscalité. Le 3ème pilier A ou lié permettait de déduire ses versements du revenu imposable tandis que le pilier 3 b ou libre requérait plus de conditions pour bénéficier d’avantages fiscaux. Ce qui n’est plus le cas depuis le 1er janvier 2021. L’objectif de cette cotisation personnelle est de s’assurer un complément de revenus, soit un niveau de vie plus confortable lors de la retraite. Ce 3ème pilier est par conséquent totalement optionnel, il est habituellement versé sous forme de capital.

À noter que le 1er pilier provient du système de répartition tandis que les 2 autres se constituent sous forme de capitalisation.

 

Comment calculer sa retraite quand on a travaillé en Suisse ?

Rares sont les frontaliers qui ont exercé toute leur carrière en Suisse. La plupart du temps, ils ont travaillé de part et d’autre de la frontière. Ce qui complexifie considérablement le calcul des droits à la retraite ! Le montant de la rente sera donc fluctuant d’une situation à une autre. Mais une chose est sûre, vous toucherez la pension française et la pension suisse.

En France, le système de retraite est calculé sur la base des 25 meilleures années.
À cela sont décomptées certaines périodes (maladie, chômage, maternité, etc.)
Si vous partez à la retraite en ayant acquitté vos annuités, vous pourrez prétendre à 50 % du revenu moyen de vos 25 meilleures années (taux de liquidation). En deçà, un pourcentage de décote est appliqué par trimestre manquant.
Le calcul se fait par conséquent de cette manière :


Salaire annuel moyen x taux en % x nombres de trimestres validés
durée maximum de trimestres en fonction de votre année de naissance

 

En Suisse, le calcul de l’AVS fonctionne avec le nombre d’années où l’on a l’obligation de cotiser au 1er pilier. Pour que la rente soit complète et maximale, il faut avoir versé l’AVS entre vos 20 ans et l’âge exact de la retraite (soit 44 ans) et avoir perçu un montant minimum de 84 600 CHF de salaire annuel.

À l’AVS viennent se cumuler la LPP que vous pouvez percevoir sous forme de capital, ainsi que la prévoyance du 3ème pilier si vous avez contribué à celui-ci.

À noter également que les frontaliers bénéficient du principe de la coordination, véritable bénéfice leur permettant de ne pas être lésés sur le dispositif de calcul.

 

Est-ce que la retraite Suisse est imposable en France ?

Percevoir une retraite suisse lorsqu’on vit en France peut s’avérer avantageuse en termes de revenus selon le nombre d'années de cotisation, et si vous avez souscrit un 2e et/ou 3e pilier suisse frontalier. Mais qu’en est-il de l’imposition de cette retraite suisse en France ?

 

L’imposition du 1er pilier suisse frontalier

 

Le 1er pilier suisse est obligatoire dès lors où vous commencez à travailler en Suisse. Il provient d’un système de répartition : l’employé et l’employeur paient chaque mois des cotisations, souvent à parts égales (à la différence du 2e et 3e piliers qui reposent sur un système de capitalisation).

 

Le 1er pilier, ou rente AVS, constitue un premier élément de votre retraite suisse perçue en France. Ainsi, bien que le prélèvement à la source ne puisse être réalisé côté français, vous serez imposé en France sur ce 1er pilier (en remplissant le feuillet 2047 sur votre déclaration fiscale).

 

L’imposition 2ème pilier suisse frontalier

Les accords bilatéraux entre la France et la Suisse, notamment concernant la convention fiscale, supposent une imposition des retraits du 2e pilier ou LPP (la Prévoyance Professionnelle) en capital dans le pays de résidence fiscal du retraité. Ainsi, pour le frontalier qui perçoit une retraite suisse et qui réside en France, l’imposition sur ce retrait du 2e pilier se fait en France.

 

Imposition du retrait en capital

Dans un premier temps, la Suisse applique à tous les bénéficiaires d'un 2ème pilier une imposition forfaitaire à la source. Ce taux d'imposition est variable et dépend du canton où se trouve votre caisse de prévoyance, mais aussi de la somme retirée et de votre situation familiale (marié(e) ou célibataire). En général, il est compris entre 4 et 10 %. Rassurez-vous, grâce aux accords bilatéraux, cet impôt prélevé en Suisse vous sera rétribué une fois votre déclaration fiscale française stipulant le retrait de vos avoirs LPP établie.

 

Des discussions entre les deux pays sont en cours dues à la nouvelle convention révisée sur la double imposition. Elle mentionne que la récupération de l'impôt suisse sur les avoirs LPP ne serait plus possible. Le Groupement transfrontalier européen se bat, aujourd'hui, pour faire entendre sa voix. Car, en l'état, l'accord ne serait pas applicable.

 

Par la suite, l'impôt français sur le retrait en capital du 2e pilier suisse frontalier sera de 6,75 % du montant total retiré avant prélèvement de l’impôt à la source suisse. Il s’agit du prélèvement forfaitaire libératoire (PFL) de 7,5 % sur lequel on réalise un abattement de 10 % qui n’est pas plafonné.

Cela signifie que si vous retirez, par exemple, 150 000 francs suisses et que la Suisse a retenu CHF 8000 d’impôts à la source, vous percevrez CHF 142 000 de la part de votre caisse de pension.

La France, quant à elle, vous imposera sur le montant total de votre retrait, soit CHF 150 000. Vous serez imposé à hauteur de 10 125 francs suisses (150 000 x 6,75 %), qui seront convertis en euros avec le taux fiscal en vigueur le jour J.

 

Remboursement de l’impôt suisse

La Suisse prélève donc l’impôt à la source lors du retrait pour être sûre que le frontalier ne manquera pas de déclarer son retrait en France.

Pas de panique, rappelez-vous que la double imposition n’est pas possible ! Ainsi, une fois l’impôt à la source prélevé côté suisse et vos revenus LPP bien déclarés en France, vous aurez la possibilité de demander le remboursement de cet impôt à la Suisse.

Certaines exceptions peuvent venir contrer cette règle, et le 2e pilier n’est donc pas imposé en France, mais les revenus entreront dans le calcul du taux d’imposition :

  • si le frontalier possède la double nationalité ou la nationalité suisse ;
  • si son dernier employeur fait partie d’un secteur du domaine public comme l'État suisse, par exemple.

 

Prélèvement forfaitaire libératoire, revenu exceptionnel, ou fractionnement

Éligibilité au PFL

Vous devez remplir l'une des deux conditions sine qua non pour être éligible au PFL, à savoir :

  • retirer votre 2e pilier pour l'achat de votre résidence principale ;
  • retirer votre 2e pilier sous forme de capital en une seule fois. Vous aurez la possibilité de récupérer la part restante sous forme de rentes (celles-ci seront imposées comme un revenu).

 

Si vous êtes éligible au PFL, vous pouvez choisir entre l'imposition au taux libératoire ou de le déclarer comme un revenu exceptionnel et dans ce cas appliquer le barème d'imposition auquel vous correspondez.

 

Revenu exceptionnel

Si le retrait de vos avoirs ne rentre pas dans l'une des deux conditions énoncées ci-dessus, alors la somme d'argent perçue sera considérée comme un revenu exceptionnel et imposé comme tel. Dans ce cas, c'est le barème de l'impôt sur le revenu qui s'applique et vous ne pourrez choisir la méthode d'imposition.

Attention toutefois, selon votre tranche d'imposition, la charge fiscale peut vite devenir conséquente, surtout si le retrait en capital de votre 2e pilier est important. Il est préférable de rentrer dans le cadre du PFL pour de gros montants.

 

Le fractionnement

Si vous optez pour le retrait de vos avoirs LPP en plusieurs fois, soit sous forme de rentes, vous demandez un fractionnement autrement appelé « split ». Ce fractionnement peut vous permettre de réduire l’impact fiscal éventuel à travers l'échelonnement de votre 2e pilier sur plusieurs années, mais cela dépendra également de votre tranche de revenu et donc de votre taux d'imposition.

 

Impôt sur les prélèvements sociaux

L’impôt sur les prélèvements sociaux peut aussi venir s’ajouter : il représente en général 9,1 % du montant total du retrait. Cet impôt concerne les frontaliers qui ne sont plus affiliés à l’assurance maladie suisse LAMal ou à la CMU frontalier au moment du retrait de leur 2e pilier, mais qui sont à nouveau rattachés à l’assurance maladie française.

 

L’imposition 3ème pilier suisse frontalier

Comme mentionné, le 3e pilier est une prévoyance individuelle facultative. Elle est constituée du 3e pilier A (pilier lié ou 3a) et du 3e pilier B (pilier libre ou 3b). Ces deux sous-piliers se différenciaient notamment par leurs avantages fiscaux, plus complexes dans le cadre d’un pilier 3b, ce qui n’est plus d’actualité depuis le 1er janvier 2021, sauf pour les frontaliers qui ont obtenu le statut de quasi-résidents.

 

La fiscalité du 3e pilier

Malgré une défiscalisation moins intéressante (sauf pour les quasi-résidents), la souscription d’un 3e pilier suisse frontalier reste intéressante.

Si vous avez souscrit un 3e pilier avant le 31 décembre 2019, sachez que vous conservez vos avantages fiscaux :

  • déduction des montants des versements selon la loi fédérale, pour le pilier 3a ;
  • déduction fiscale des montants des versements selon la loi cantonale, pour le pilier 3b.

Souvent versé sous forme de capital, le retrait du 3e pilier suisse frontalier est taxé sur la base du barème de l’impôt sur le revenu (IR) en France, même s’il bénéficie d’une réduction.

Tout comme pour le 2e pilier, vous serez donc soumis à l’impôt à la source en Suisse (dont vous pourrez également demander le remboursement). Puis, à l’impôt français à hauteur de 6,75 % du montant total retiré.

Cependant, les piliers 3a et 3b diffèrent quant à leur mode d’imposition.

 

Le 3ème pilier A (pilier lié)

En suisse, l’imposition du pilier 3a est un peu particulière, car elle dépend du capital perçu et de votre situation en qualité de bénéficiaire. Plus le montant du retrait est élevé, plus votre taux d’imposition l’est aussi (avec un taux maximal de 15 % d’imposition sur le montant total du retrait).

En France, si durant la phase de constitution de votre 3e pilier A les primes étaient non déductibles de vos revenus suisses imposables, seuls les intérêts perçus sont imposables. Pour les anciens frontaliers genevois, et uniquement ceux-ci, lorsque vous retirez votre pilier 3a en capital, vous êtes soumis à l’impôt forfaitaire unique (PFU), soit 6,75 %.

Si vous choisissez le retrait du pilier 3a en rentes, celles-ci sont imposables à hauteur de 100 %.

Le pilier lié a un point fort pour les frontaliers genevois quasi résidents : il permet de déduire vos versements annuels lors de votre demande de rectification d'impôt. Ainsi, si vous êtes travailleur frontalier salarié, vous avez la possibilité de déduire jusqu’à 7056 francs suisses sur l’année en cours, soit le montant de la cotisation maximale autorisée.

Pour les indépendants qui ne possèdent pas de 2e pilier suisse, vous pouvez profiter d’une déduction jusqu’à 20 % de vos revenus (plafond maximum CHF 35 280-. par an pour l’année 2023).

 

Le 3ème pilier B (pilier libre)

La fiscalité du 3e pilier B est complexe, car elle dépend de plusieurs facteurs.

  • Fiscalité en phase d’épargne

Seuls les quasi-résidents du canton genevois peuvent bénéficier d'avantages fiscaux. Les autres cantons intègrent les primes avec celles de l’assurance maladie et donc, il n'y a pas de déduction fiscale possible. Les gains réalisés chaque année doivent avoir été déclarés tout au long de votre phase d’investissement.

  • Retrait du pilier 3b en capital

Du côté français, il est assimilé à une assurance vie de moins de 8 ans et est assimilé aux produits des bons de capitalisation et d'assurance-vie souscrits auprès d'entreprises d'assurance établies hors de France :

« Conformément au 6° de l'article 120 du CGI, sont imposables à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des valeurs mobilières étrangères, les produits attachés aux bons ou contrats de capitalisation et d'assurance-vie souscrits auprès d'entreprises d'assurance établies hors de France (BOI-RPPM-RCM-10-30). »

Par ailleurs, il est prévu des exonérations particulières. Voir également notice explicative des conditions d'imposition.

  • Retrait du pilier 3b en rentes

En cas de versement en rentes, elles sont considérées comme un revenu et sont donc imposables (à hauteur de 40 %).

  • Primes déductibles et non déductibles

Comme pour les autres piliers, vous devez déclarer ce montant perçu comme élément de revenus. Et là, la fiscalité s’en voit modifiée en fonction de vos primes déduites ou non. Cependant, il est important de noter que seuls les cantons de Genève et Fribourg permettent la déduction des primes sur la taxation cantonale (et non fiscale).

L’imposition de la retraite suisse en France peut s’avérer complexe, notamment si vous avez souscrit un 3e pilier. Il est essentiel d’être bien informé afin d’optimiser au mieux ses retraits en capital ou en rente, et profiter de sa retraite suisse en toute sérénité… côté français !

Le Guide du frontalier vous accompagne et vous conseille pour améliorer votre quotidien ! N’hésitez pas à consulter nos articles !