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12 déc. 2025
7 min.

Crise de l’horlogerie suisse : l’emploi frontalier sous pression

Crise de l’horlogerie suisse : l’emploi frontalier sous pression

Dans l’horlogerie suisse, les périodes de creux ne font pas de bruit, mais elles peuvent s'installer. Un planning qui se resserre, une mission qui ne se prolonge pas, une cadence qui baisse “temporairement”… puis, sans prévenir, le quotidien bascule : moins d’heures, moins de visibilité, plus de questions. C'est malheureusement ce qui se passe actuellement avec la crise de l'horlogerie suisse. Dans l'Arc jurassien, la Vallée de Joux et les ateliers de sous-traitance on tire la sonnette d'alarme. Mais il y a-t-il un impact pour les emplois frontaliers ?

Si vous travaillez en Suisse et rentrez chaque soir en France, vous n’avez pas besoin de rumeurs pour comprendre que la situation est critique : vous le voyez sur le terrain. L’enjeu, maintenant, consiste à distinguer la simple baisse d'activité d’un changement plus profond, afin de garder une longueur d’avance. Pour cela, suivez le Guide !

Crise horlogerie suisse : prévisions fin 2025

Dans l’horlogerie, un ralentissement ne commence pas par une annonce. Il commence par de petits signaux très concrets : des délais qui s’allongent, des séries qui se réduisent, des commandes qui se “recalibrent”, et des recrutements qui prennent soudain plus de temps. Ces signaux, l’Arc jurassien et la Vallée de Joux les connaissent bien en ce moment.

Les chiffres qui résument l’ambiance du secteur nous viennent de la Fédération Horlogère : en octobre 2025, les exportations horlogères suisses reculent de 4,4%, à CHF 2,2 milliards. Le recul se concentre surtout sur certains marchés, avec une baisse marquée vers les États-Unis (-46,8%) dans la statistique mensuelle.

Ce contexte explique pourquoi les entreprises deviennent plus prudentes, même quand elles cherchent à préserver leurs équipes clés. Dans la pratique, la pression se déplace souvent vers ce qui s’ajuste vite : volumes confiés aux sous-traitants, heures variables, missions temporaires. Et c’est exactement ce qui peut créer un effet direct sur l’emploi frontalier dans l’horlogerie.

Découvrez comment devenir horloger en Suisse dans notre article dédié.

Quel impact sur l'emploi frontalier quand l'horlogerie est en crise ?

Intérim et missions courtes : la première variable d’ajustement

Quand une manufacture ou un sous-traitant doit réduire la production, la direction cherche d’abord à garder le cœur de compétence (les postes clés, les savoir-faire rares). Résultat : les ajustements tombent souvent sur ce qui bouge vite… donc l’intérim, les renforts de production, les missions “finition”, “contrôle”, “assemblage” ou “logistique” selon les besoins.

Ce que vous pouvez observer concrètement :

  • des missions non renouvelées (sans que cela remette en cause votre travail) ;

  • des plannings raccourcis ou découpés semaine par semaine ;

  • davantage de candidatures pour moins d’offres, donc un retour plus lent.

Sous-traitance : l’effet domino

Dans l’Arc jurassien, l’horlogerie fonctionne en écosystème. Quand les donneurs d’ordres réduisent une série ou décalent une livraison, l’impact descend en cascade : moins de volumes confiés, moins d’heures à distribuer, plus de pression sur les marges. Pour les frontaliers présents chez les sous-traitants, cela se traduit souvent par une seule chose : moins de visibilité à 2–3 mois.

Un signal à prendre au sérieux : quand votre atelier commence à parler “réorganisation”, “priorisation des urgences”, “gel des renforts”, la baisse d’activité ne reste plus théorique.

CDI : plus de stabilité, mais pas une immunité

Un CDI vous donne généralement plus de continuité, mais la crise peut tout de même se voir :

  • par une réduction des heures supplémentaires ;

  • par un changement de périmètre (polyvalence demandée, affectation sur d’autres tâches) ;

  • par une pression accrue sur la performance (qualité, délais, rebuts).

L’idée n’est pas de s’inquiéter à la moindre alerte, mais de lire les signaux tôt, pour éviter d’être pris de court si la phase “temporaire” dure.

Si vous préférez jouer la sécurité, découvrez quelles sont les industries qui recrutent, selon votre secteur d'activité.

RHT (chômage partiel) : un amortisseur… qui peut vite peser sur votre quotidien

RHT en clair : à quoi sert ce dispositif ?

Quand l’activité ralentit, certaines entreprises activent la RHT (réduction de l’horaire de travail) pour éviter des licenciements immédiats. L’idée reste simple : vous travaillez moins pendant une période, et une partie de la perte de salaire se compense via l’indemnisation.

Pour vous, frontalier, le point important ne change pas : ce dispositif se décide côté employeur et s’organise par équipe / service / période. Vous ne “choisissez” pas la RHT, vous la subissez… ou vous en profitez comme d’un filet de sécurité si votre poste subit une baisse temporaire d'activité.

Ce qui se passe concrètement (et ce qui doit vous alerter)

La RHT se repère souvent avant même l’annonce officielle :

  • moins d’heures planifiées (et parfois semaine par semaine) ;

  • heures supplémentaires coupées net ;

  • cadence revue à la baisse “jusqu’à nouvel ordre”.

Ce n’est pas forcément un mauvais signe à court terme. En revanche, si la baisse se prolonge, le risque augmente : perte de visibilité, pression sur les missions temporaires, et parfois réorganisation interne.

Checklist : les 7 questions à se poser tout de suite

Pour éviter les zones floues, vous pouvez demander clairement à vos chefs d'équipe :

  1. À partir de quand la RHT démarre et pour combien de temps (première période annoncée) ?

  2. Quel taux de réduction (ex : -20%, -40%) et sur quels jours ?

  3. Votre service est-il concerné en continu ou par rotation ?

  4. Quelles règles pour les jours fériés, vacances déjà posées, absences prévues ?

  5. Comment l’entreprise communique-t-elle les plannings (J+7, J+14) ?

  6. Quels critères peuvent mettre fin à la RHT (retour commandes, délais, etc.) ?

  7. Si la situation dure : existe-t-il un plan B (mobilité interne, changement d’équipe, formation) ?

Si la situation se dégrade, vous trouverez toujours des informations et conseils sur le Guide du Frontalier pour préparer votre candidature en Suisse.

Vos relais et vos droits : ne restez pas seul face au ralentissement

Quand l’activité baisse, le réflexe le plus risqué consiste à attendre “que ça passe” sans rien clarifier. Dans l’horlogerie, les décisions se prennent souvent vite et se répercutent sur les plannings encore plus vite. Vous avez donc tout intérêt à vous entourer et à poser un cadre dès les premiers signaux.

Votre premier interlocuteur : le RH (et votre responsable direct)

Objectif : obtenir des réponses factuelles, pas des impressions.

Concrètement, vous pouvez demander :

  • si la baisse concerne tout le site ou uniquement un atelier / une ligne ;

  • si l’entreprise parle d’un “creux” (quelques semaines) ou d’un ajustement plus long ;

  • quel est le niveau de risque sur les renouvellements, l’intérim et les renforts.

Astuce : faites toujours confirmer les éléments clés par écrit (même un e-mail court après l’échange). Cela évite les malentendus, surtout quand les consignes évoluent.

Les agences d’intérim : un thermomètre du marché

Si vous êtes en mission ou si vous visez un poste, les agences de recrutement voient passer la tendance avant tout le monde. Une question simple suffit :

  • “Le volume de demandes augmente ou baisse cette semaine ?”

  • “Quels profils restent demandés malgré le creux ?”

  • “Quels ateliers recrutent encore, même ponctuellement ?”

Même si vous êtes en CDI, ce retour terrain vous donne un indicateur précieux : la tension réelle sur le bassin d’emploi.

Les syndicats : utiles quand la situation se durcit

Beaucoup de frontaliers hésitent à se renseigner, par peur de “se griller”. Pourtant, quand les horaires bougent, que la pression monte, ou que les décisions deviennent floues, un syndicat peut apporter :

  • une lecture claire de vos options ;

  • un appui pour comprendre les démarches ;

  • un accompagnement si un différend apparaît.

Il ne s’agit pas de partir au conflit : il s’agit de ne pas rester isolé quand les règles changent. Les syndicats suisses sont là pour vous aider que vous soyez frontalier ou pas !

Plan d’action si votre activité baisse : 4 réflexes pour garder la main

Quand la cadence ralentit, la différence se joue rarement sur “la chance”. Elle se joue sur la réactivité. L’objectif n’est pas de tout chambouler du jour au lendemain, mais de mettre en place des actions simples qui vous redonnent de la visibilité… et des options.

1) Obtenez une réponse claire sur le cadre (même si elle est imparfaite)

Dès que vous sentez un flou, posez des questions courtes et factuelles :

  • Quelle est la visibilité : 1 semaine, 1 mois, 1 trimestre ?

  • La baisse concerne-t-elle toute l’équipe ou seulement certains postes ?

  • Est-ce une baisse de charge “temporaire” avec une date de point… ou une adaptation sans échéance ?

Même si l’employeur n’a pas toutes les réponses, vous devez repartir avec un minimum de cadre : durée estimée, mode de fonctionnement, prochain point de situation.

2) Mettez à jour votre CV et votre profil “à la suisse” (avant d’en avoir besoin)

Beaucoup de frontaliers attendent le dernier moment. Mauvais timing : quand les offres se raréfient, la concurrence augmente.

Ce que vous pouvez faire en 60 minutes :

  • remettre votre CV au propre (1–2 pages, concret, orienté résultats) ;

  • ajouter des mots-clés métiers (contrôle qualité, terminaison, assemblage, micromécanique, logistique… selon votre profil) ;

  • préparer 2 versions : horlogerie + industrie voisine (microtechnique, mécanique de précision, medtech, etc.).

3) Activez 3 canaux en parallèle (sans vous disperser)

Quand le marché se tend, un seul canal ne suffit plus. Vous gagnez du temps en combinant :

  • agences / intérim (pour capter les besoins immédiats) ;

  • réseau (anciens collègues, responsables d’atelier, cooptation) ;

  • candidatures directes (entreprises ciblées, même sans offre parfaite).

Astuce : fixez-vous une règle simple. Exemple : 2 agences contactées + 5 entreprises ciblées + 3 relances réseau par semaine.

4) Protégez votre budget avant que la baisse ne se voie trop

Si vos heures diminuent, l’impact arrive vite sur le compte en banque. Les meilleurs réflexes :

  • prioriser les charges fixes (logement, voiture, assurances) ;

  • différer ce qui peut l’être (achats non urgents) ;

  • créer un “plan 30 jours” : ce que vous coupez, ce que vous maintenez, ce que vous surveillez.

Ce n’est pas glamour, mais c’est ce qui vous évite de prendre une décision dans l’urgence.

La crise de l’horlogerie suisse rappelle une chose : quand la cadence baisse, l’impact peut vite toucher l’emploi frontalier, surtout sur les postes les plus “flexibles”. La bonne approche consiste à rester lucide, à surveiller les signaux concrets et à vous mettre en mouvement avant d’être contraint de le faire.

Si votre activité ralentit, ne laissez pas l’incertitude s’installer : préparez vos options et gardez un coup d’avance. Pour structurer vos démarches et candidater efficacement, retrouvez notre guide pratique : Candidature en Suisse


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